Surf way of life
Cet été, nous étions de passage à Lacanau. Pas côté lac, où l'on trouve les canoés, les planches et bateaux à voile voire à moteur, mais côté océan, avec les plagistes et les surfeurs. Et comme nous étions au mois d'août, nous avons pu assister au Lacanau Pro, compétition de surf et étape du « World Qualifying Series », la ligue d'accès au circuit d'élite du championnat du monde de surf, le "World Championship Tour", regroupant les 38 meilleurs surfeurs et 17 meilleures surfeuses professionnels du monde. Ce n'est donc sans doute pas le haut du panier mais le niveau est déjà plus que bon. Il s'agit quand même de la plus vieille compétition professionnelle de surf en France puisqu'elle a vu le jour en 1979, créée par quelques membres du Lacanau Surf Club. On l'appelle aussi le French Pro depuis 2005 où il est sponsorisé par Soöruz. Mais cette année, la compétition a changé de nom et de sponsor principal. Ne l'appelez plusle Soöruz Lacanau Pro, mais le Médoc Océan Lacanau Pro.
Cette compétition a été surtout pour nous l'occasion de perfectionner notre connaissance de la culture "Surf".
A l'origine du surf
Le Surf, ou Surf-riding en anglais (riding signifiant « chevaucher » et surf « déferlantes »), trouve ses sources, si l'on en croit les experts et spécialistes en tous poils, dans l'océan pacifique et plus précisément à Hawaï. James Cook, célèbre navigateur et explorateur britannique est le premier européen à accoster aux îles Hawaï, en 1778 et à observer les indigènes surfer. Tué lors d'une bataille par les indigènes d’Hawaii, c'est son lieutenant, James King, qui relate dans le journal de bord la pratique du surf telles qu’il a pu l’observer à Kealakekua Bay, sur la grande île d’Hawaii.
Au 15ème siècle le surf était une pratique courante chez les populations des îles Sandwich (l'autre nom de l'archipel hawaïen). Elle permettait aux chefs de tribus qui défiaient la mer et ses éléments sur de longues planches en bois de prouver leur puissance et leur supériorité. Les Polynésiens, quant à eux, se mesuraient les uns aux autres lors de duels, au terme desquels le meilleur voyait son rang s’améliorer au sein de sa Communauté. Sa pratique a été malheureusement interdite lors de l'annexion en 1898 de l'archipel par les Américains qui voyaient le surf comme un acte de dépravation, car les hawaïens le pratiquaient quasiment nus. C’est Duke Kahanamoku, nageur et surfeur américain, qui fit réapparaitre le sport en 1900. Le champion olympique de natation dispute de nombreuses courses en exhibitions en Californie et en Australie, et en profite pour faire des démonstrations de surf et donner une nouvelle impulsion à ce sport.
En France, le surf arrive en août 1956 avec Peter Viertel, scénariste américain venu avec le producteur de cinéma américain Richard Darryl Zanuck à Biarritz au Pays basque tourner le film "Le soleil se lève aussi", inspiré du livre d'Ernest Hemingway. En voyant les vagues, il se fait livrer une planche de Californie pour pouvoir surfer. Les pionniers du surf en France s'appellent Joël de Rosnay, Georges Henebutte, Jo Moraiz...affectueusement surnommés les tontons surfeurs par l'auteur-réalisateur-surfeur Alain Gardinier. Mais les débuts sont laborieux : Les planches sont lourdes. Il n'y a pas de matériel de protection comme les combinaisons, pas de fabricants de planches.
Les années 60 crée le déclic avec l’arrivée des anglo-saxons et de nouveaux matériaux tels que le polystyrène et la fibre de verre qui permettent d’avoir des planches plus légères. Petit à petit, la renommée de la côte basque, berceau du surf en France, grandit, grâce à ses spots qui marchent toute l’année et qui ne sont pas très dangereux.
C'est ainsi qu'aujourd'hui, on peut surfer avec des planches courtes (shortboad), évolutives (compromis entre la planche courte réservé aux confirmés et les mini-malibus, grandes planches stables privilégiées par les débutants), des planches appelées fish (bien adaptées aux petites vagues), ou encore mini-malibus, grandes planches dont la stabilité offrent une glisse facile aux débutants et les longues planches (longboards), permettant de s'offrir des rides d'une longueur incroyable et une glisse tout en douceur dans le style des années 60, mais qui sont lourdes et difficiles à manœuvrer pour les débutants.
Le plaisir du surf
Le surf est une activité de loisir qui a l'avantage de procurer du plaisir quel que soit le niveau du pratiquant. il y a toujours ce plaisir intense (intense car très éphémère, un ride durant environ 15 secondes) de se sentir poussé par l’énergie d’une vague. Et les surfeurs peuvent passer du temps à l'attendre, leur vague. Un peu comme Brice de Nice.
Les surfeurs l'appellent «stoke», la vague de la journée, celle qui vous donne la banane. "Stoke" est une adaptation anglaise du mot néerlandais stok du 17ème siècle, utilisé pour décrire le réarrangement des bûches dans une cheminée afin de faire apparaître les flammes.
Les surfeurs de Californie ont commencé à utiliser le mot dans les années 50 et les surfeurs continuent à l'utiliser fréquemment dans toutes ses nombreuses variantes. Les effets persistants du surfer stoke - ce que vous vous sentez après la montée d'adrénaline - peuvent être attribués, selon les dernières recherches scientifiques, aux ions négatifs émis par les remous de l'eau et les embruns marins, qui peuvent pousser à bloc les niveaux de sérotonine.
Comme le disait Joël de Rosnay, ce qu'il apprécie dans le surf "c'est d'abord un sentiment de communion avec la nature. Je ne me bats pas contre la houle. Je ne suis pas en compétition avec la houle. Ces éléments naturels ne sont pas mes adversaires mais mes partenaires. J'utilise leur force, leur puissance, pour le plaisir, l'exercice, le défi vis-à-vis de moi-même."
Surtout, c’est le caractère zen (ou cool, pas comme Igor d'Hossegor) du surf qui attirent les nombreux pratiquants. Pour beaucoup de surfeurs, le meilleur moment de la journée pour partir en mer est au début de la journée ou en soirée, lorsque le vent est tombé et que le soleil descend. Être sur l’océan est une forme de méditation. C'est un style de vie partagé par ceux qui se sente en relation étroite avec l'environnement.
En sus du plaisir procuré, cette activité développe la force dans le haut et le bas du corps, la flexibilité et l’équilibre (le besoin de trouver son équilibre sur la planche permet de raffermir les cuisses et les mollets, et particulièrement les abdominaux qui sont naturellement mis à contribution) et les mouvements de nage sont un excellent exercice cardiovasculaire, le mouvement de la rame permettant de se muscler les bras, mais aussi tout le haut du corps. Il existe même aujourd'hui une Surf Thérapie, méthode pour se sentir mieux dans son corps et dans sa tête grâce aux bienfaits de la mer, de l’air marin et du soleil. Le surfeur body-buildé et bronzé australien n'est pas un mythe, c'est une réalité.
Le mythe des surfeuses
Souvenez-vous : en 1963, The Beach Boys, groupe de "rock" américain originellement affilié à la "surf music" chantaient "Surfer Girl". Groupe de Surf Music avant tout, avec leur batteur, Dennis Wilson, seul surfeur de la formation, et leur premier tube « Surfin' » en 1961, suivi de « Surfin' USA » en 1963. C'est le California Sound des Beach Boys, rythmé par le soleil, la plage, le surf et les jolies filles, qui envahit la planète dans les années 60. Les seuls à rivaliser avec les Beatles à cette époque.
Little surfer little one
Made my heart come all undone
Do you love me, do you surfer girl
Surfer girl my little surfer girl
I have watched you on the shore
Standing by the ocean's roar
Do you love me do you surfer girl
Surfer girl surfer girl
We could ride the surf together
While our love would grow
In my Woody I would take you everywhere I go
So I say from me to you
I will make your dreams come true
Do you love me do you surfer girl
Surfer girl my little surfer girl
Well
Girl surfer girl my little surfer girl
(ter)
Et bien si on en croit les photos qui trainent sur la toile, le mythe n'est pas si loin de la réalité. Simplement, les surfer girls ont troqué le bikini, pas très pratique, pour la combinaison.
Crédit photo : Yannick Faure - Surfer Lifestyle
Plus qu'un sport, un art de vivre
Plus qu'un sport, le surf a toujours été un style de vie (lifestyle dirait un bon surfer), voire un art de vivre (mais çà, c'est uniquement pour les surfers français). Le surfeur calque son existence sur le rythme des saisons, des vents et des marées. Petit à petit, qu'elle soit de Biarritz, Hossegor (comme Igor), Coolangatta où Florianopolis (comme Brice), cette tribu en est venue à créer, avec beaucoup d'inventivité et de talent, ses propres codes, ses propres modes d'expression, ses propres repères. Rapidement adoptée par la France, l'Europe, puis par le reste du monde, la surf culture parle avant tout anglais. Les hawaiiens, les californiens et les australiens se sont alliés pour inventer le surf riding, puis sa mode (le surf wear), sa musique (la surf music), ses films (les beach movies), ses autres représentations artistiques (peinture, sculpture, bande dessinée…) ses modes de transport (voir ci-après), sa façon de se nourrir, sa littérature, ses objets, sans oublier ses héros, ses idoles, ainsi que plusieurs sports dérivés ou connexes, tels le paddle, le bodyboard, le funboard, le kite-surf, le wavesky… Le but ? Avant tout s'amuser, profiter de chaque instant, de sa liberté, des atouts de la nature. Ce mouvement de contre-culture est devenu une culture à part entière, avec ses codes et son jargon.
Les codes du surf way of life
Le Shaka
Il y a tout d'abord le shaka (également connu sous le nom de « hang-loose » chez les surfeurs). Le quoi ?? Le shaka est un signal de main d'origine de Hawaï. Shaka signifier « relax » ou « détends-toi ». Le shaka est un rappel constant qu'à Hawaï, la norme est de ne pas stresser ni se presser. Le signe shaka représente donc le "style des îles".
Il indique que tout va toujours bien. Les hawaïens utilisent ce signe n'importe où et n'importe quand pour répandre l'aloha, remercier celui qui les laissent traverser la route ou pour dire bonjour ou au-revoir. C'est une sorte d’anti doigt d’honneur et c'est vraiment "cool".
Il incarne parfaitement l'état d'esprit de la glisse et du surf : « cool », « amuse-toi » et « have fun ! ». Pas étonnant donc qu'il soit devenu le signe de ralliement des « riders » du monde entier, notamment chez les surfeurs. Même les baleines s'y sont mises...
Les surfeurs s’en servent pour laisser une vague à un autre surfeur. C’est une courtoisie, chacun sa vague, chacun son tour.
Pour faire un shaka, il suffit de fermer la main pour former un poing. Il faut ensuite tendre son pouce et son petit doigt dans des directions opposées, le dos de la main faisant face à celui à qui est adressé le signe. Accompagner le signe d'une légère rotation du poignet pour le rendre plus visible.
Le langage
C'est le code le plus compliqué à apprendre. Il est fait d'argot anglais ou australien, voire français et mêle la technique à l'art du slow living (vous voyez, je m'y met aussi). Il y a par exemple le back flip air, sorte de combiné entre l'aerial, virage effectué en haut de vague permettant au surfeur de décoller de la vague, celui-ci se retrouvant dans les airs, et la pirouette arrière pour terminer face à la vague. Ou encore le SNI, le Surfeur Non Identifié, le Tube, figure où le surfeur se laisse recouvrir par la vague qui forme un rouleau. Le Tube est la manœuvre qui s'accorde le plus avec l'esprit du surfeur, recherchant l'harmonie avec la vague. Bref, le langage "surf", pour le parler, il faut surtout pratiquer le surf. Et le reste suit...
Le combi Volkswagen
La voiture du surfeur, quand il a une voiture, est généralement une décapotable, pour pouvoir transporter le surf, mais aussi profiter du soleil et du vent. Oui...disons plutôt que c'est un beau cliché qui fait faire de belles photos, comme celle ci-contre.
Généralement, si voiture il y a, il s'agit d'un combi Volkvagen T2 - les versions successives T3, T4 et l’actuel T5 n'ont jamais rencontré le même succès, oubliez-les. La combi T2, cette icone héritée des années hippies, représente en effet la liberté et la vie de rêve pour tous les amateurs de surf et de voyage, grâce notamment à sa modularité, sa capacité à emporter 8 personnes, et son toit sur lequel on peut facilement loger les grandes planches de surf.
Le combi T2 est cet « objet du désir » commun aux surfeurs, tout du moins à une certaine époque du surf, et aux passionnés de voitures « custom ».
Il est vrai qu'on ne voit plus trop de combi de nos jours, mais l'engouement pour ce genre de voiture, rénovée bien sûr est toujours présent chez les surfeurs, comme en témoigne SurfinPortugal. Grâce à lui, les surfeurs peuvent toujours partir en surf trip avec style. Et comme Volkswagen relance la fabrication du T2, version électrique, qui sait, peut être reverrons nous ces fameux mini-bus près de nos plages.
Mais le vrai véhicule du surfeur, c'est la moto.
S'il est vraiment riche, le surfeur choisira voiture et moto. Sinon, la seule moto suffira à son bonheur. Car que ce soit en surf ou en moto, le même vent de liberté souffle pour les "riders".
Cette dernière photos ne sera pas sans rappeler le surf road movie "South to Sian", pour ceux qui ont suivi le surf trip de Deus Ex Machina (littéralement Dieu sorti de la machine) sur leur blog, South to Sian. Deux motos, une pile de planches de surf, un vieux Land Rover, des paysages indonésiens et des spots de surf à couper le souffle : Une recette parfaite pour un voyage plein de plaisir. En faisant ce film, nos deux voyageurs voulaient éviter la foule et les clichés. Mais si certains endroits de la planète sont bondés, c'est souvent pour de bonnes raisons. Vous pourrez donc y voir certaines des meilleures vagues du monde, de jolies ballades à motos, des paysages et des rencontres.
Le surf et la moto
Le surf et la moto, c'est une longue histoire d'amour. Bizarre me direz-vous. Comment peut-on transporter un surf en moto, il n'y a déjà quasiment pas de place pour les bagages. Alors un surf ? Mais c'est sans compter sur l'ingéniosité des surfeurs et de leurs équipementiers. Il suffit de mettre un porte-surf sur le coté. Un peu comme un side-car.
BMW R65 scrambler par Atelier 11
Le BMW Concept Path 22 est le fruit d’une coopération entre BMW Motorrad France et Southsiders MC, Ornamental Conifer et Dyer Brand (pour le surf)
Quand vous voyez la BMW R-Nine T scrambler, vous savez que motos « custom », ou plutôt motos néo-retro customisables, le surf et la mode sont la nouvelle tendance du moment. Si vous aimez la moto, vous n'avez pas pu passé à côté : le vintage, le style Bobber ou Café Racer sont à la mode.
Le surf et la moto sont liés dans l’esprit d’une poignée d’hommes et de femmes qui se situent à l’avant garde, comme Deus Ex Machina (je crois vous en avoir parlé un peu plus haut), qui organise du 14 au 16 octobre 2016 le Deus Slidetober Moto Surf Rally à Bali ou Iron & Resin, un magasin californien dont le slogan est "freedom riders" et qui vend motos vintage, équipements de surf et vêtements allant avec. Ce sont aussi des gens qui aiment à la fois le surf et la moto et qui ont eu le bon goût de croire que lier les deux était possible et justifié. Peut-être parce que le surf et la moto véhiculent tous les deux des valeurs fortes mais similaires : la recherche de la liberté, une certaine idée de la marginalité et un soupçon de contre-culture. Et probablement une certaine démarche esthétique : les motos vintage, ce n'est pas toujours très pratiques mais c'est beau et fun.
Pour mieux comprendre l'esprit véhiculé par ces deux grands du commerce (ils ont quand même des magasins à travers le monde), le mieux est de regarder les petits films promotionnels qu'ils réalisent, comme celui de Iron & Resin "Iron & resin", ou encore "Lost & Found in Baja".
En France, ce mouvement est véhiculé par le Southsiders Motorcycle Club, qui organise le Wheels and Waves à Biarritz chaque année, ou encore Atelier 11, Créateurs de motos et de voyages.
Les principaux événements en France
Il y a bien sûr le seul, l'unique, Le Lacanau Pro (c'est bien à cause de lui que j'écris cet article), qui se déroule généralement entre le 11 et 21 août (les dates sont purement indicatives puisqu'elles varient légèrement chaque année en fonction des marées et des vents).
Il y a aussi les Quiksilver et Roxy Pro France 2016 qui se déroulent sur la plage des Culs Nuls à Hossegor, du 4 au 15 octobre. C'est un peu plus dur d'accès évidemment.
Et bien sûr, les Wheels and waves, chaque année à la cité de l'océan de Biarritz, du 11 au 18 juin.
Allez, encore quelques photos pour la route
Si vous avez aimé cet article, n'oubliez pas de shaka liker ma page. Et bon surf !
A découvrir aussi
- Koezio : Entre Fort Boyard et l'Escape Game
- Pratiquer du sport en écoutant de la musique
- Savoir si un aérosol-doseur est vide ou non